photo n&b retouchée·poésie

Captcha

Captcha qui fait de moi 4 véhicules à moteur 
ou 3 arbres ou 5 panneaux indicateurs
La couleur de mon identité est rouge comme un camion de pompier
ou bleu comme un ciel sans nuage 
Sélectionnez l’image correcte 
Captcha à valider 
quel réflexe quel effet de lumière contourne le défaut d’authentification
de différenciation d’un humain qui aurait perdu son corps
qui l’aurait égaré entre le pouce préhenseur et l’index qui swipe
Non, je ne suis pas un robot 
Non, je ne suis pas un imposteur numérique
Là où je suis des racines poussent
et le vert devient plus vert que des milliers de pixels
sans oxygène
Perle Vallens

photo n&b retouchée·poésie·prose

Salivaire

Les salives débordent des bouches et avec elles les mots qu’on a empêché de sortir
cloués au mérite de la gorge s’imbibent d’un jus trop épais pour passer

C’est un crachat mélancolique un trop plein sans calcul sans considération qui qui n’a pu entendre prononcer qui n’a pu claquer en retour sa réponse à la non question

Les bouches sont des cloaques d’où s’extirpent avec peine les dernières volontés
de la journée
clapotis tendres en va et vient dont on ne sait s’ils ont encore un sens

Les vœux se chantent selon ciel clément selon clavier bien tempéré
on laisse traîner un peu de Bach au palais pour éviter le pourrissement
une mesure ou deux suffisent à apaiser la canine plantée dans les aigus
la molaire sur la langue râpeuse qui écorche le nom
suffisantes à diffuser songe lénifiant sa lotion de toujours

Combien de kilomètres avant les dernières notes
combien de temps avant le dernier tempo lent fondu dans les bouches

Perle Vallens

photo n&b retouchée·poésie

it girl (II)

itgirl badass avatar
vrai artpiece est apparition
subliminale
ultra_HD_face avant smog-effect
comme disparition progressive
du visage (identité non compatible)

ton écran 4K de gamer
2x-plus-de-stockage
120-fps pour fille plus ___fluide
plus floue ou plus folle
fille fondue au noir à la fin
Ctrl+Shift+S commande défectueuse
la fille ne se capture pas

l’escapekey est une clé comme les autres
dont on ne sait ce qu’elle ouvre

ne sait quel chemin emprunter
pour repixeliser les contours les couleurs
(RGB file failed)
espace |||||||saturé

stresstest sur itgirl
celle son déficit de popularité
celle sous bad influence
ou bad influenceuse

celle dissoute en streaming
elle dit message me

itgirl ou camgirl
elle remaquille son ton espoir
blushing ta libido démasquée (surex)
elle dit love-you-all
repeat repeat repeat
please
itgirl n’est pas yourgirl

[It girl][http://www.itgirl.com/itgirl.jpg]
error 403 – Forbidden
contenu invisible peut-être effacé
#lafille perdue dispersée
dans le cloud

Perle Vallens

atelier Tiers Livre·écriture·photo n&b retouchée·prose

La danseuse

Parquet lisse, trop lisse. Ça glisse. Trop. Il faut la colophane. Etaler en couches successives, là où ça glisse. Ne pas frotter, ne pas ramper, ne pas essuyer le surplus, garder une couche suffisante. Dessus les chaussons tiennent. Ils tiennent bon. Ils tiennent droit, debout les demi pointes, les pointes, bien enrubannées autour des chevilles. Les collants, dessous, amovibles, c’est plus facile. Peut-être les embouts de silicone. Ou en mousse. Ou les tubes pour les gros orteils (en silicone et élastique recouvert de tissu). Peut-être le sparadrap. C’est pour protéger. Avant elles mettaient des escalopes de poulet ou de veau, tu te rends compte ? Ou peut-être les pédilles pour un peu moins glisser encore, ou pieds nus juste si danse contemporaine ou jazz. Le pied accroche. C’est la corne formée dessous à force de danser. C’est la sueur qui colle au bois vernis, au plancher de la scène. Le pied. Le coup de pied, parfait bombé, cette courbe, la tension, la force, l’élan. Tu te vois au miroir, front dégagé et chignon net, bien tiré. Le justaucorps ajusté. Tu ne souris pas tu te concentres. La figure, l’enchaînement, l’entraînement. Adage, attitude, assemblé soutenu, pas de basque, pas de bourrée, brisé, grand battement, pas chassé, contretemps, déboulé, dégagé, demi-plié, dégagé, demi-plié, pirouette, piqué, jeté, fouetté, glissade. Travailler son écart, son en-dehors, sa position, son port de bras, épaules tirées, dos droit, et tirer sur les pointes et garder sa couronne. Répétition de la variation, du pas de deux, On dit déchiffrer puis répéter encore et encore, jusqu’à la blessure. Enfin juste avant. A la limite. Ce sont les endorphines qui font tenir. L’ivresse de la danse. Ça tourne, ça tourne, ça tourne la tête. Et l’envolée quand tu t’élèves bien au-dessus du sol, de toi, du public.
Perle Vallens

Ecrit ( par accumulations en suivant la façon de C. Tarkos) en hommage à ma dancing queen.

atelier Laura Vazquez·photo n&b retouchée·photo négatif·poésie·prose

A un moment

A un moment on se. On se quitte.
A un moment il y a des rails, un métro, un train, une voie de séparation.
A un moment le monde se voile. Il se délabre et s’éparpille. Il se disperse.
A un moment quelque chose se creuse à l’intérieur, un lac immense qui déborde.
A un moment je marche dans une flaque plus grande et plus lourde que moi. Je m’arrache à la flaque mais c’est trop tard, j’ai déjà fondu. Je marche liquide sans savoir où je dois poser mon pied.
Ce qui se nomme garde-corps ne garde plus rien qui a fuit par les pores, qui se frotte à l’asphalte sans rien à se raccrocher.
Les passerelles sont faites pour passer, les ponts pour sauter.
Le pas. Le parapet. Les pas perdus. Le prêt-à-tomber.
Où est mon parachute ?
C’est trop tard, mon visage est passé par dessus-bord.
Perle Vallens

atelier Laura Vazquez·écriture·photo n&b retouchée·poésie

Avec ou sans

VuLe flambeau m’a fui
Le feu m’a fondue quand le bois m’a brûlée 
L’oiseau m’a piqué de son bec avec de la cruauté dans le regard 
Le renard a mordu mon ombre 
La peau m’a trompée m’a tordue au bord du gouffre

Que veux tu me dire que tu n’oses pas ? 

Je t’aime avec l’enfant qui flotte en moi
Je t’aime avec ma fureur et tous ses tremblements
Je t’aime avec les mains lourdes de sens 
et de senteurs 
avec ma peur de mal faire de ne plus savoir comment effleurer 

Comment doit-on s’y prendre pour se défier ? 
Où flotte le peu l’insuffisant l’insalubre ? 
Où puis-je ne pas trouver l’insupportable vérité ? 
Sur quel bouton reset où reloader ? 

Je t’aime avec mon téléphone qui clignote et s’éteint qui ne dit rien de plus qui ne géo-localise aucune logique ni aucune réponse 
Je t’aime avec tous mes écrans fluides et non genrés 
je t’aime queer quidam d’un amour maquisard (qui l’eût cru)
Je t’aime comme je te parle avec une langue insuffisante qui ne fouille pas assez qui rechigne à entrer dans les trous du monde

Où ai-je mis mes caresses où mes traces désertées ? 

Je t’aime avec et je t’aime plus encore sans 

Perle Vallens