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Inktober 2023 (fin)

26/10 enlever/supprimer 
Je balbutie mes rêves sans savoir vraiment 
s’il faut enlever ou ajouter des métaphores 
aux messages
s’il faut supprimer le flouté l’effet dansé qui ressemble un peu à la joie 
qui ressemble à la vie 
PV

27/10 bête
Cette bête féroce monstrueuse qui sommeille 
en moi
sait aussi miauler et te mangera dans la main 
pourvu que tu saches la dompter
sinon c’est elle qui te dévorera 
PV

28/10 scintiller 
L’œil braque 
le soleil ses faux fuyants 
le meilleur comme le pire 
ce qui scintille luit aussi bien qu’il aveugle 
PV

29/10 destruction massive 
Qui sait entendre le silence 
les traces décimées 
les fumées de phosphore
toutes armes de destruction
massive 
Qui sait où commence et où finit 
le principe d’auto-défense 
PV

30 se précipiter 
S’ouvrir la poitrine, y faire entrer le monde est ce geste chirurgical, précautionneux avec lequel on s’avance à découvert, on s’expose, on se met à nu pour faciliter la greffe. La part de l’autre entrée en soi. Ce qu’il faut c’est procéder lentement, sans se précipiter, avec l’assurance nécessaire, la confiance. Lier sans fuite ce moi à son alter ego. 
PV

31/10 feu
Au-delà du feu il y a encore du feu. Il y a la chaleur du feu, l’ombre du feu. Il y a les braises et les cendres. Il y a le souvenir du feu. Le souvenir du feu, c’est encore du feu.
PV

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Lectures collectives, hommage à Emmanuelle Cordoliani

Il y a parfois des lectures croisées, des initiatives et des hommages collectifs sur le Tiers Livre qui est un peu une vaste famille (comme celle des ateliers de Laura Vazquez, qui a fait naître des groups de discussion, d’entraide, de bêta-lecture…), on s’achète, on s’échange nos ouvrages, on se lit (les derniers en date, Maison des mues de Catherine Serre et Comanche de Caroline Diaz). Cette fois, il s’agit d’une lecture en vidéo du « Journal d’un mot » de Emmanuelle Cordoliani. J’ai choisi le mot affection, monté sur un extrait vidéo d’un ballet contemporain. Chaque extrait vidéo a été collecté et l’ensemble monté, diffusé sur la chaîne youtube du Tiers Livre de François Bon:

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Inktober 2023 (5 par 5, 4)

21/10 chaînes
De toutes ces chaînes qui nous enferment
dont nous sommes prisonniers
les plus fermement closes sont celles
qui emprisonnent notre volonté
PV

22/10 rugueux 
La vieille peau usée rugueuse des mots
à répétition leur terre asséchée
aride leur sens déserté
par quelle parole nouvelle les remplacer
PV

23/10 céleste
Le mur d’en face est une faille céleste
le mur du fond s’efface sur sa propre fissure
s’ouvre sur une dimension passée
où ma figure s’encastre
PV

24/10 superficiel
Taire ses blessures même superficielles qui elles aussi percent, laissent voir, creusent comme les plus profondes, leurs galeries de fragilités que l’on souhaite garder cachées. Taire est subterfuge ou dissimulation, est surtout pudeur dis-tu. Taire et s’en tenir aux choses extérieures.
PV

25/10 dangereux
Tu sais que le désir qui te pousse est dangereux, que la vie même est dangereuse. Vivre c’est risquer, mais craindre de vivre c’est mourir à petit feu. La peur est une plante toxique aux ramifications vénéneuses, elle se plante en toi et t’empoisonne par lente paralysie.
PV

photo n&b·poésie

A ras-bord

je remue les mousses salivaires
dans les pièges tendus des lèvres
je ne sais plus ce qui est baiser
ou mot
dans la bouche qui palpite
je ne sais plus qui a tort ou raison
tant la voix prime sur les autres bruits

j’hésite entre le cul sec et la noyade
quand bien même mouille la scène au bord
des yeux où se barbouille le crâne
d’images floues
la bobine défilée crève dans la fonte
des événements
saigne sur l’écran cramé
dans l’alcool qui saoule à flot

aucune vidéo à la demande n’offre
un tel ventre plein de tiraillement
aucune séquence filmique ne trame aussi bien
les caractéristiques du manque
ce creux ménagé pour accueillir
toutes les dents acérées par la faim
les glandes ont la sécrétion persuasive
et on se dit mort de soif

rien ne gâte comme le sucre l’accès
à la mémoire comme
un coma éthylique où
pris de boisson on ne se rappelle rien
des raisons de la veille
quand déjà l’ivresse est loin
ce sable alcoolisé où on s’enlise
où on s’ensevelit

on dérive on dégueule ses tripes à la fin
quand bien même on a l’estomac
et le cœur vides
on continue à boire et remplir la vie à ras bord

Perle Vallens

photo n&b·poésie

Sur cintre

Texto arrivé sans verbe
avoue ton corps revêtu
décousu d’habitudes
plusieurs versions de toi encore
disponibles

ton corps sur cintre du désir
demande la main qui froisse
les grands désordres
et d’autres corps entrés en rêve
sans efforts

ton corps en devanture de mémoire
tremblant dans l’ombre du désamour
tant d’indices abandonnés
errants sur les routes numériques
je décide de n’en adopter aucun

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Inktober 2023 (5 par 5, 4)

16/10 ange
j’aligne ange et homme
l’un vif l’autre frelaté
deux interchangeables
dans leurs floraisons
quid de leur envol
si l’un a les ailes coupées
PV
17/10 démon
quand les scrupules et la culpabilité
nous morcellent
l’esprit arraisonne
condamne à la brûlure
d’une infernale autoflagellation
je me demande : la honte est-elle toujours
du côté du démon
PV
 
18/10 selle
Quand la vie nous emporte
au grand galop
dis-moi ce qui nous maintient en selle
PV
 
19/10 charnu
Allongée mobile muette encore
dans la cavité buccale claque
et vient se coller
sa partie la plus charnue au palais
érectile pour énoncer : la langue 
PV
 
20/10 gel
Trop de paroles prises dans le gel
de la conscience de la consigne 
de la contrainte 
Trop d’injonctions qu’on s’injecte 
volontairement ou non dans la veine cave
et pourrissent le cœur jusqu’à la moelle
PV
photo n&b·poésie

Décapitation

parfois cracher ne suffit pas
haut seuil de violence s’il faut faire le mur
passer de l’autre côté
se laisser choir
la glisse ça me connaît
c’est une histoire de tempérance
d’acceptation
s’amincir
se rabattre vers son centre
fermer les yeux ou les baisser
se taire ou se terrer
ne revient pas tout à fait au même
tôt ou tard je relève ma tête
bien campée sur la nuque
sans craindre la décapitation
Perle Vallens